IRON MAIDEN
Exclusif ! Rencontre à Dallas !
Au bout du monde…
Dallas (Texas) … Dimanche 06 Juin 2010
Entretien avec Bruce Dickinson, Steve Harris,
Adrian Smith et Dave Murray...
- De notre envoyé spécial, Adrien Begrand
avec la collaboration de Mickael Mouchet -
On a peine à croire que quatre années sont déjà passées depuis la sortie d'A Matter Of Life And Death, le plus long intervalle entre deux albums en trente-cinq ans d'histoire. Cependant, et je ne vais surprendre personne, cette attente a été propice, puisque The Final Frontier n'est pas seulement le quinzième et excellent opus des Anglais mais, sans contexte, le plus puissant qu'ils aient jamais écrit, depuis que Bruce Dickinson et Adrian Smith ont rejoint à nouveau le groupe en 1999...
Alors que le groupe est en plein préparatif d'une tournée estivale aux États-Unis, vingt journalistes musicaux internationaux, dont votre serviteur, ont été conviés à venir sous une chaleur étouffante (40 degrés à Dallas), écouter le fameux nouvel opus, rencontrer le groupe, consommer généreusement des litres de bières mexicaines, et lui demander finalement comment leurs millions de fans doivent comprendre le titre dudit album. Parce qu'Iron Maiden est arrivé à un tel niveau que nous ne voudrions pas le voir s'arrêter en si bon chemin....
Avec ce titre, The Final Frontier, la première chose à laquelle pensent les gens, c'est qu'Iron Maiden scelle ici sa dernière pierre !
Steve : Nous pensions qu'ils pourraient être amenés à penser cela, ou bien alors que nous sommes des fans de Star Trek, voire les deux ! (Rires !) Mais ce n'est pas nécessairement cela. Nous ne nous considérons pas comme pouvant être notre ultime album, nous espérons qu'il ne le soit pas du moins. Mais tu ne sais pas ce qui peut se passer demain. Là, nous allons partir à peu près deux ans en tournée pour promouvoir cet album. Nous verrons comment ça va se dérouler. Nous ne rajeunissons pas.
Bruce : Hier c'était l'anniversaire de Nicko, il vient d'avoir 58 ans. Donc tu imagines, dans deux ans et demi, il en aura 60 et nous viendrons seulement de finir notre tournée, puis nous repartirons sur l'écriture d'un autre album, ce qui sous-entend encore deux années de tournées en plus... ce qui pousse jusqu'à soixante-cinq ou plus pour lui. C'est quelque chose que tu ne peux pas prendre à la légère. Mais il joue toujours merveilleusement bien, il est phénoménal ! Puis bon, qui sait ?! Nous allons prendre cette tournée comme elle vient. S'il s'avère qu'elle sera notre dernière, je serai fier qu'elle se termine de cette façon et non pas sur un « Iron maiden de glace » ou bien « Iron Maiden avec un orchestre symphonique de ses plus grands hits », ce qui serait horrible !
Ce qui m'a également fait penser cela, c'est que j'ai trouvé qu'il y a un grand côté introspectif dans les textes de ce nouvel album...
Adrian : Tu as raison. Il y a une chanson qui s'appelle « Coming Home », qui pourrait relater ce que pourrait être notre dernière tournée, parcourant le monde, et rentrant enfin chez nous à la fin.Cela te traverse l'esprit quelquefois : tu fais le point et tu te dis « Wow, j'ai fait tant de kilomètres et tant de concerts », c'est de l'introspection. Je pense que c'est ce que tu es amené à faire un jour ou l'autre, après vingt ou trente ans de carrière, en regardant tout ce que tu as fait jusque là.
Bruce : Absolument ça l'est. Je ne suis pas sûr de bien savoir pourquoi, mais ça l'est. Les textes ont pris cette tournure naturellement. Ce n'est pas comme si Steve et moi avions lu, chacun, les textes de l'autre, en même temps que nous les écrivions, mais nous avons abordé tous les deux les mêmes choses au même moment. « Coming Home » est en effet un bon exemple de chanson introspective. Je l'ai écrite alors que nous étions dans l'avion en pleine tournée. À ce moment, je me remémorais notre carrière et je m'étais dit : « nom de dieu les gars ! Réalisez-vous seulement ce que nous venons de faire ? ». Plus précisément, je me suis surtout interrogé sur ce que je devais faire. Alors j'ai voulu essayer d'en donner quelques idées : d'abord ce que c'est que d'être dans ce petit monde épique que nous transportons avec nous, ensuite ce que c'est, en fait, que d'être à bout de course, d'avoir ce regard étonnant et ce que tu ressens d'avoir réussi tout cela par toi-même.
Steve : Au fond de nous, nous savons que nous n'allons pas continuer indéfiniment et que nous arrivons au terme de notre carrière. Bien évidemment, nous sommes dans le circuit depuis longtemps déjà. Je ne sais pas si ça s'est reflété dans l'album. Peut-être inconsciemment, mais je ne pense pas que c'était intentionnel.
Quel sentiment avez-vous eu de retourner, vingt-cinq ans plus tard, enregistrer aux Compass Point Studio à Nassau, aux Bahamas ?
Bruce : On aurait dû le renommer le Mary Céleste (en référence à la goélette retrouvée sans personne à son bord), parce que je jure devant Dieu qu'il y avait encore des cigares dans le cendrier. Lorsque je dis que c'était le même, je veux dire vraiment le même. Le billard était le même, le tapis le même.
Dave : En fait, c'était par simplicité. Nous avons enregistré en France, en Hollande, en Allemagne, en Angleterre, et nous sommes revenus ici. Cela faisait depuis les années ‘80 que nous n'y étions pas retournés, et comme nous avions entendu qu'ils n'avaient pas changé, nous voulions le voir de nos yeux, et, effectivement, il n'avait pas du tout changé.Il y avait déjà cet aspect sympa de repos construit dans le studio. Kevin Shirley y a apporté son matériel récent, ce qui lui a donné ce type de son. Mais c'était génial de voir que rien n'avait changé... Et c'était super de retrouver cette familiarité, lorsque tu as l'habitude de voyager très souvent et de voir tout bouger sans cesse. Vraiment génial d'y avoir passé quelques semaines. Mais nous avons fini cinq semaines plus tôt que prévu. Nous travaillions de Lundi au Vendredi, en y allant à la mi-journée et en travaillant sept heures d'affilée. Une fois que nous avons retrouvé la spontanéité et le jeu de groupe, nous avons tout bouclé rapidement. Nous voulions capturer la performance, tant qu'elle était fraîche, et je pense que nous y sommes arrivés.
Steve : C'était génial, vraiment très plaisant, l'un des meilleurs moments depuis bien longtemps. Tout simplement parce que c'est relaxant d'être loin de tout ! Nous n'avons cependant pas fait autant la fête qu'à l'époque, parce que c'était les années ‘80 et que tout le monde était dans l'esprit alors, mais cela mis à part, tout s'est déroulé de la même façon.
Bruce : Les Bahamas sont elles-mêmes un peu étranges. Ce n'est pas comme Vegas. Nous sommes sortis un peu des sentiers battus, nous avons trouvé quelques petits endroits sympas, comme la cabane à Daiquiri qui était une petite hutte en bois sur le côté de la route et qui te servait les Daiquiris les plus stupéfiants que tu n'aies jamais bu, mais cela semblait être également le fumoir local. Ce qui nous l'a fait penser se trouvait également dans la musique. Nous étions assis là et il y eu ces sons et murmures étranges. Puis il y avait beaucoup de voitures, mais qui ne s'arrêtaient que brièvement dans l'arrière-cour (Rires !). C’était marrant. En fait Steve y habite maintenant. Il a quitté l'Angleterre pour les Bahamas.
Comment vous est venu le titre éponyme ? Son intro est la chose la plus heavy que vous ayez jamais faite !
Adrian : J'ai écrit beaucoup de titres chez moi dans mon studio. J'adore composer, c'est vraiment une folie pour moi : peindre avec des notes. J'avais cette musique, et je l'ai loué à Steve, parce qu'il supervise l'album, tout passe par lui. Et il a tout de suite accroché, ça l'a inspiré, l'ambiance générale, « The Final Frontier » et tout le reste. J'ai cru que nous allions l'enregistrer comme ça, mais en fait, nous avons pris ce que j'avais fait et nous l'avons retravaillé ensemble, parce que nous voulions que ça sonne différemment d'une version studio.Tout a démarré ainsi.
Bruce : L'intro est étrange, parce qu'elle est pavée de plusieurs démos qu'avait Adrian, auxquelles nous avons ajouté des « overdubs » sur les parties de batterie ainsi que sur mes lignes de chant. C'est un vrai méli-mélo, comme si vous voguiez dans un heavy metal d'avant-garde, puis d'un coup ça part, bap ! (NDLR : il mime le riff du début...) Lorsque j'ai entendu pour la première fois « The Final Frontier » en répétition, je leur ai demandé : « Êtes-vous sérieux ? Nous allons vraiment jouer ça ? C'est vraiment génial ! ». J'étais ravi, j'étais vraiment ravi, mais vraiment abasourdi qu'ils soient venus avec un tel titre !
Y a-t-il une chanson dont vous êtes le plus fier ?
Adrian : J'aime bien « Coming Home ». En terme de son c'est la meilleure chanson de l'album. J'aime les paroles également. Pleins de personnes peuvent s'y identifier, ceux qui sont loin de chez eux, qui, une fois qu'ils reviennent, qu'ils renouent avec leurs racines, se sentent là où ils sont le mieux. Tout le monde le souhaite, et la plupart y arrivent.
Steve : Celle qui se détache du reste, selon moi, c'est « Starblind ». Au début que nous l'avons joué, je l'ai trouvé sympa et tout, mais de plus en plus, elle est devenue une chanson entêtante. Elle s'est transformée en un cheval noir, ma favorite !
Bruce : « When The Wild Wind Blows », simplement parce que je trouve que c'est une pièce fantastique. « The Final Frontier » également, et j'aime aussi « The Talisman », parce qu'elle te secoue, comme un bon coup de poing dans la figure. Je pense que « The Talisman » prendra toute sa direction en live, elle va tout déchirer.
Dave : Pour moi c'est « Avalon ». Cette chanson est brillante, atmosphérique : j'ai même l'effet du vent qu'il y a dedans, c'est comme un voyage...
Adrian : Oui il y a un peu de vent sur cet album n'est ce pas ?
Dave : Ouais il y a beaucoup de vent, beaucoup de vent chaud aussi ! (Rires !)...
OZZY OSBOURNE
Diary of a madman
Entretien exclusif avec Ozzy Osbourne...
- Par Dana Henderson -
« Lorsque j'ai quitté l'école je voulais devenir plombier. Lorsque j'ai écouté les Beatles, j'ai souhaité devenir un Beatles... ».
Peu importe son âge et sa culture musicale, tout métalleux qui se respecte doit avoir écouté Ozzy Osbourne au moins une fois dans sa vie. Le poids que cet homme a eu sur la scène heavy metal est considérable. Tout a commencé pour lui avec Black Sabbath et l'album éponyme paru en 1970, toujours considéré comme le premier album de heavy metal jamais réalisé. Après avoir été évincé de la bande à Tony Iommi, Ozzy s'en est allé vers une carrière solo qui croisa autant les excès que les rencontres, notamment le chemin du défunt et talentueux Randy Rhoads...
« Flash back » au début des années 80 : l'âge d'or du heavy metal. « Bark at the moon ! », hurlait Ozzy osbourne en 1983 ! Clin d'oeil à son passé au sein de Black Sabbath qui le hantait encore de ses vieux Démons.
Dans la vidéo à l'époque, j'apparaissais en tant que scientifique complètement fou. Dans l'asile où je me trouvais, il y avait ce loup-garou qui courait partout et me pourchassait.
Une chanson qui a mené à de nombreuses controverses et interprétations, comme l'avaient été auparavant « Mr. Crowley » et « Suicide Solution »...
“Suicide Solution” fut écrit après la mort de Bon Scott d' AC/DC : il avait trop bu cet hiver là et il avait décidé de passer la nuit dans sa voiture. Et Bon est mort d'hypothermie. Le titre de la chanson peut prêter à confusion, le morceau lui-même devait parler de l'alcool comme d'un liquide mortel.
Quand j'écrivais « Solution », je pensais à « mixture ». Mais cette « solution » a tout de suite été vue comme une « réponse »...
Les anecdotes ne manquent pas lorsque le Madman : surnom qui lui a été attribué dès son entrée dans Black Sabbath, se remémore les coulisses de « So tired ».
Si je me souviens bien, il y avait une erreur dans le dosage des explosifs qui devaient servir à faire voler en éclat un miroir. Lorsque je me suis retrouvé devant cette glace, une énorme déflagration a eu lieu, le miroir m'a littéralement explosé au visage. Heureusement, seulement quelques blessures mineures...
Le temps passe et 1991 devient une année charnière dans la vie personnelle et artistique de l'enfant de Birmingham...
J'ai commencé une bataille difficile pour devenir sobre et cette fois, j'étais bien décidé à en finir avec ses addictions. No More Tears fut le premier album que j'ai enregistré en n'étant pas ivre : il dégage d'ailleurs quelque chose de différent que tu ne retrouves sur aucun des albums précédents. C'est un mélange de ballades douces, comme sur « Mama, I'm Coming Home » et de titres typés hard rock, à la façon de « Hellraiser ». Nombreuses de ces chansons furent co-écrites avec Lemmy de Motörhead, et « Mama, I'm Coming Home » fut entièrement écrite par lui. « Road To Nowhere » était un instantané de ma vie à l'époque, tandis que « Mr.Tinkertrain » évoquait les attentats à la pudeur vécus par certains enfants. J'ai même remporté un Grammy pour la chanson « I Don't Want To Change The World » !
Ozzy créa la surprise en appelant la tournée No More tours..
J'en avais assez de tourner et je voulais passer plus de temps avec ma famille. J'étais malade, je souffrais beaucoup physiquement, ce qui m'a forcé à annuler plusieurs concerts.
Ozzy eu du mal à gérer la pression de cette tournée et c'était selon lui la dernière. Le groupe était alors composé de Zakk Wylde (guitare), Mike Inez (basse) et Randy Castillo (batterie)...
Nous avons enregistré plusieurs shows durant ces dernières tournées. On a ensuite fait le tri de tout ça, c'est cette sélection que tu peux retrouver sur la compilation Live And Loud.
Après deux décennies faites de hauts et de bas, Ozzy est de retour avec Scream, son dixième album solo. Un retour en force si l'on en juge par la potentiel des titres comme « Let Me Hear Your Scream », « Let It Die » ou « Soul Sucker »
Le line-up marque néanmoins un changement de taille, puisque Zakk Wylde ne répond pas à l'appel. Le premier manquement depuis 1988...
Zakk et moi ne sommes pas du tout en conflit. Il possède son propre groupe, Black Label Society, et il était temps pour moi de lui trouver un remplaçant permanent. Zakk est beaucoup plus qu'un musicien pour moi. Il fait partie de ma famille et je suis membre de la sienne. Tu sais, je suis le parrain de son fils.
Son remplaçant se nomme Gus G., qui est connu dans le milieu heavy metal pour son engagement dans Firewind depuis 1998 et pour ses diverses participations au sein de Dream Evil, Mystic Prophecy et Nighrage...
C'est un grand guitariste. Il fait partie de ces musiciens qui jouent les chansons comme elles ont été écrites à l'origine. Et il les joue avec une aisance incroyable ! Je ne compare pas à Zakk, ni aux autres guitaristes avec lesquels j'ai travaillé, mais j'ai vraiment de grands espoirs pour sa carrière.
En plus de Scream, Ozzy Osbourne rééditera très bientôt ses deux premiers albums, Blizzard Of Ozz et Diary Of A Madman. Deux albums qui replongent dans les frasques de l'époque : citons, entre autres, une consommation gargantuesque de drogues et d'alcool ainsi que des épisodes scandaleusement mémorables d'un concert à Des Moines (USA) en 1982 : sur scène, le “Madman” arrache la tête d'une chauve-souris avec les dents
Tout cela est une partie de moi, mais derrière tout ça, tu sais, je reste toujours un père, un mari, un homme tout simplement. Cela me semble étrange, lorsque les gens pensent que je vis dans un château bavarois et que je dors la tête à l'envers, perdu aux chevrons du toit, et que je vole chaque nuit autour de la bâtisse pour faire le tour du propriétaire. Tu y crois à ça ? Cela fait tant de temps que j'ai essayé de quitter le Ozzy de la scène et de devenir moi-même, mais au final, je me suis perdu dans la confusion des deux personnages.
À la fois Docteur Jekyll dans la vie privée et Mister Hyde lors de ses apparitions scéniques, Ozzy est un personnage qui a toujours intrigué. Le septième art s'intéresse d'ailleurs à lui et prévoir d'adapter sa vie dans un long-métrage. Une biographie cinématographique qui tarde cependant à voir le jour...
Je ne veux vraiment pas que se soit un Américain : les Américains n'ont pas un bon accent Anglais. Sharon et moi-même avons rencontré Johnny Depp pour jouer le rôle il y a six ans de cela. Le jour suivant, j'étais en cure intensive de désintoxication, donc cette rencontre n'a mené à rien.Lorsque tu vois des acteurs célèbres prendre le rôle de gens célèbres, tu ne peux pas t'empêcher de dissocier leurs personnages. Il y a d'un côté Ozzy et de l'autre Johnny Depp. C'est ce que je ne veux pas pour ce film. Je suis persuadé qu'il faut prendre quelqu'un de totalement inconnu pour jouer mon rôle.
En attendant, cela fait plus de quarante ans que John Michael Osbourne crève l'écran...
Avec tous les excès que j'ai fait, je devrais être mort depuis longtemps. Heureusement, je ne suis pas allé aussi loin pour que cela arrive. J'ai survécu ! Aujourd'hui, à soixante-deux ans, je ne prends plus rien pour acquis, car je sais que tout peut basculer du jour au lendemain.